De nos jours, l’écologie est au centre des préoccupations, de même que l’envie de nous tourner vers des choses plus naturelles et saines pour notre corps.
Certaines marques de cosmétique s’appuient là-dessus pour proposer des produits qui sont « naturel » ou « clean » (littéralement : propre). Ainsi, la Clean Beauty (« beauté propre » littéralement) fait partie des courants qui surfent sur cette vague du naturel pour proposer, ou prétendre proposer, des produits qui seraient meilleurs pour notre santé, s’éloignant des « composants chimiques ».
Aujourd’hui dans notre article, on vous expose la dure réalité qui se cache derrière le mouvement de la Clean Beauty.
Un exemple pour illustrer la Clean Beauty : Goop (par Gwyneth Paltrow)
Gwyneth Paltrow est connue dans le monde des cosmétiques pour avoir une grande tendance à la contradiction ainsi qu’à la désinformation. De nombreux experts en soin de peau ont ainsi critiqué la star, qui répond des informations trompeuses à ses fans, qualifiant ses propos de pseudoscience.
Il n’est donc pas étonnant que la marque de l’actrice, qui s’inscrit dans la Clean Beauty, soit un parfait exemple pour illustrer les mauvais (voire dangereux) aspects de ce mouvement.
Les « dangereux produits chimiques »
La Clean Beauty de Goop nous conseille ainsi d’éviter les « dangereux produits chimiques », ainsi que les ingrédients préservateurs, pour des produits plus clean.
De manière assez drôle, elle conseille ainsi d’utiliser son exfoliant « Goopglow », qui contient de l’acide glycolique et non de l’acide salicylique, qui serait quant à elle néfaste selon la marque.
L’ironie est double : tout d’abord, il s’agit bien évidemment toujours de produits chimiques, c’est-à-dire des ingrédients qui ont été extraits, travaillés et perfectionner par des scientifiques pour les rendre efficaces sur notre peau sans risque.
Ainsi l’acide glycolique vient des fruits, tandis que l’acide salicylique vient de l’écorce d’arbre, mais si nous mettions directement de l’écorce d’arbre ou du fruit sur notre peau, elle n’en sortirait pas idem !
La deuxième contradiction, c’est que d’après la marque l’acide glycolique serait acceptable contrairement à l’acide salicylique…
Pourtant, la première est beaucoup plus agressive que la deuxième ! Ainsi pour une peau sensible, l’acide glycolique, qui va plus en profondeur dans les pores, ne sera pas forcément recommandé.
Le fait même de parler de produits chimiques en les déconseillant est un non-sens dans le domaine, qui est… de la chimie !
Les experts en cosmétiques et surtout en soin de peau sont des scientifiques, et leur savoir-faire et leurs connaissances sont justement ce qui rend les produits efficace et sain pour notre peau. Nous avons besoin de cette chimie pour formuler les soins.
Bien sûr, cela ne signifie pas que certaines marques utilisent des ingrédients qui ne sont pas recommandés, voire même potentiellement dangereux avec notamment des perturbateurs endocriniens. Il y a du mauvais dans les produits « clean » et dans les produits traditionnels, et il est important d’apprendre à s’en préserver.
Pour cela, vous pouvez par exemple utiliser des checker d’ingrédients, comme celui de https ://skinsort.com/ (anglais), qui permet de savoir quels ingrédients sont potentiellement mauvais ou non adaptés à votre peau, en copiant-collant la liste d’ingrédients.
Clean = pas de préservateurs ?
La marque Goop, comme de nombreuses autres marques Clean, se veut sans préservateurs. De prime abord, on pourrait être tenté par cette promesse. Effectivement, il y a de bons et de mauvais agents préservateurs dans les soins de visage (à nouveau, n’hésitez pas à vous renseigner sur les ingrédients). Cependant, les préservateurs ont un rôle crucial.
C’est grâce à ces préservateurs que votre crème ne va pas s’emplir de bactéries, moisir et pourrir en deux mois après l’ouverture.
Ce sont ces préservateurs donc qui nous protègent, en évitant la propagation de vilaines bêtes dans nos crèmes, qui sont ensuite appliquées sur notre visage. Il va sans dire que si on s’applique une dose de crème qui contient des bactéries sur notre peau, bonjour l’éruption cutanée. Et on ne pourra pas compter sur le peroxyde de benzoyle (ingrédient très efficace pour lutter contre les bactéries), puisque d’après la Clean Beauty, il fait partie des dangereux ingrédients chimiques ;).
De l’huile, de l’huile et encore de l’huile
Si les soins de visage utilisent principalement de l’eau comme base (base universelle), les soins de visage dits « naturels » utilisent quant à eux pour la grande majorité de l’huile.
La raison est simple et liée au point précédent : l’huile a moins de chance d’être la base d’une culture de microbes ou des bactéries. Comme il n’y a pas de préservateurs, l’huile est donc utilisée pour permettre au produit de durer un peu plus longtemps (en général deux mois).
Si un produit à base d’huile est parfois souhaitable (par exemple, pour un démaquillant), trop d’huile est nocive pour votre peau, pour plusieurs raisons :
– Si vous avez une peau sensible, par exemple avec un psoriasis, l’huile peut avoir un effet très irritant sur votre peau. D’ailleurs, si vous avez souvent une sensation de chaleur voire de brûlure lorsque vous essayez des soins, pensez à vérifier que vous n’êtes pas simplement sensible à l’huile. Et la même chose avec les alcools, qui forment avec l’huile des éléments qui ont tendance à irriter les peaux sensibles.
– Si vous avez la peau grasse, vous rajoutez encore du gras par-dessus, ce qui n’est pas vraiment souhaitable.
– L’huile ne pénètre pas dans la peau. C’est pour cela que l’huile est généralement présente en démaquillant (avant le nettoyant qui va la retirer complètement) ou dans les crèmes hydratantes (dernière étape de la routine). En effet, l’huile n’hydrate pas (d’ailleurs, elle ne se mélange pas à l’eau). Elle sera donc utile seulement en première étape, pour enlever le maquillage avec douceur, ou en dernière étape, car après avoir hydraté notre visage, l’huile pourra ainsi venir par-dessus pour donner du glow.
En anglais, il existe d’ailleurs deux mots : « moisturize » (enfermer l’hydratation dans la peau, renforcer la barrière naturelle) et « hydrate » (infuser l’eau et donc l’hydratation à l’intérieur des cellules de la peau), ce qui évite la confusion (en français hélas, les deux se traduisent par hydrater).
La Clean Beauty : l’enfer est pavé de bonnes intentions
Le mouvement partait pourtant d’une promesse sympathique, bien que pas du tout nouvelle : plus de transparence, moins d’ingrédients, un produit qui respecte la peau et l’environnement… Malheureusement, aucune charte n’existe et les termes ont très rapidement été détournés pour être utilisés dans un marketing de la peur, qui joue sur l’exagération et la désinformation pour faire sortir le portefeuille.
L’utilisation ainsi du terme « naturel » n’a aucun sens. Déjà, car tout et n’importe quoi peuvent être considérés comme naturel (il n’y a pas de définition stricte), ensuite parce que le naturel peut être toxique. D’une part par sa nature (ciguë par exemple), d’autre part par sa quantité. Comme tout dans le monde, la quantité fait la toxicité. Ainsi on peut s’intoxiquer avec trop d’eau et faire un coma éthylique.
Les masques maison sont à ce titre bien plus dangereux que les masques formulés par les scientifiques. Si vous utilisez du citron pur sur votre peau, vous l’attaquer avec un PH élevé (comme les acides des produits), mais avec une dose qui n’est pas contrôlée, et, surtout, sans que ses effets négatifs n’aient été désactivé par les scientifiques. Ainsi, si vous exposez au soleil après avoir mis du jus d’agrumes sur votre visage (qui met 24h à partir), vous risquez des brûlures, voire des cloques !
Et ce n’est qu’un exemple parmi bon nombre. De la même manière, évitez tous les soi-disant exfoliants maison, à base de sucre ou de pépins, qui causent des microdéchirures et peuvent détériorer irrémédiablement la qualité de votre peau.
L’huile (encore elle !) peut également causer des brûlures, rendre votre peau plus sensible ou provoquer des réactions allergiques.
Pour faire simple : ne mettez JAMAIS de la nourriture sur votre visage. N’utilisez rien qui ne soit pas spécifiquement formulé pour cet usage.
Dans la même lignée que le Greenwashing
Au final, la Clean Beauty s’inscrit dans le même mouvement que les Greenwashing : l’utilisation de désinformation pour créer un intérêt marketing et se faire de l’argent. D’ailleurs, le prix des produits sur Goop est indécent, et encore plus lorsque l’on voit les ingrédients.
D’ailleurs, l’utilisation d’ingrédient « naturels » (plutôt que synthétiques) est un point commun, et c’est en réalité très mauvais pour l’environnement !
Pour produire ces ingrédients organiques, une quantité importante de ressources est utilisée, pour une masse énorme de produits qui, une fois fini, ne représenteront que très peu. Et le processus lui-même de transformation nécessite beaucoup de ressources.
Ainsi, l’huile de Palme est un ingrédient organique. Pourtant, on connait les dégâts causés en termes de déforestation et d’émission de CO2.
Les ingrédients synthétisés sont donc en réalité bien meilleurs pour la planète. Le même effet, mais avec un produit créé en laboratoire en utilisant le moins de ressources possibles… Que demander de mieux ?
Des techniques basées sur la peur
La Clean Beauty s’appuie ainsi sur la peau pour faire du chiffre. En créant la panique autour de termes comme l’acide rétinoïque, alors que ce sont des éléments d’une part parfois présents naturellement dans notre corps, et que dans tous les cas, ils ne peuvent être toxiques qu’à grandes doses (comme tout !).
La Clean Beauty s’est d’ailleurs retrouvée dans un scandale après avoir critiqué et fait se propager une rumeur selon laquelle les crèmes solaires seraient toxiques (alors qu’il est indispensable pour notre santé d’en utiliser), ou encore dans leur critique des silicones, alors qu’ils sont utilisés même dans le cadre médical (pour les brulures notamment).
Conclusion sur la Clean Beauty
En bref, n’hésitez pas à vous renseigner auprès d’instances de qualité pour ne pas mettre n’importe quoi sur votre peau (en vidant votre portefeuille par la même occasion). Pour cela, ce sont les instances scientifiques qui sont les plus fiables.
Il est important de ne pas se laisser avoir par ce marketing de la peur, de plus en plus présent autour de nous et ce dans tous les domaines.
Note : cet article est très grandement inspiré par Cassandra Bankson (experte en soin de peau, chercheuse et spécialiste de l’acné).